Un joyau sucré venu de l’océan Indien
L’ananas Victoria, ce petit fruit gorgé de soleil, semble s’être laissé bronzer sous les tropiques pour mieux nous envoûter. Cultivé principalement à La Réunion et à l’île Maurice, il a tout pour séduire : un calibre modeste, une peau dorée et surtout, une chair incroyablement sucrée et parfumée. Mais cet ananas, plus noble que ses cousins importés en containers, mérite bien qu’on lui offre une préparation à la hauteur de ses saveurs.
Alors… Comment préparer ce délice tropical pour en révéler toutes les nuances ? Vous êtes au bon endroit. Laissez-moi vous guider dans la découpe, la dégustation — et même quelques petites astuces pour le sublimer. Car oui, l’ananas Victoria, ce n’est pas juste une belle gueule en salade de fruits.
Choisir son ananas Victoria : tout commence au marché
On le reconnaît facilement à sa taille plus compacte — une jolie petite boule dorée d’environ 800 g — et à son parfum puissant qui a la particularité de chatouiller le nez bien avant d’arriver à la maison. Pour bien le choisir :
- La couleur : c’est simple, plus il est doré, meilleur il est. Fuyez ceux qui tirent vers le vert pâle : ils ne sont pas assez mûrs.
- Le toucher : il doit être ferme, sans être dur comme un melon d’hiver. Un peu de souplesse sous la pression du doigt est bon signe.
- L’odeur : fiez-vous à votre nez ! Un parfum sucré et légèrement acidulé signe une bonne maturité.
Petit bonus : privilégiez les ananas Victoria en AOP de La Réunion – gage de qualité et de respect des pratiques agricoles locales.
Avant de le couper : un geste secret de grand-mère réunionnaise
Voici une étape que peu de gens connaissent… mais qui change tout. À La Réunion, certaines familles ont l’habitude de laisser leur ananas Victoria reposer, tête en bas, pendant quelques heures — voire toute une nuit — avant de le découper. Pourquoi ? Cela permet au sucre, naturellement plus concentré à la base, de se répartir vers le haut du fruit. Astuce simple, mais délicieuse.
Un petit support type mug retourné, ou un fond de bol, suffira pour l’installer “cul en l’air” sans qu’il ne bascule. C’est aussi une jolie manière de lui dire : « prépare-toi, je vais te sublimer ».
Découpe chic et sans chichi
Passons à l’action. Armez-vous d’un couteau bien aiguisé et suivez ces étapes pour une découpe efficace et esthétique.
- Étape 1 : Coupez la tête et la base de l’ananas, de manière à pouvoir le poser bien à plat sur votre planche.
- Étape 2 : Avec votre couteau, suivez la courbe du fruit pour retirer la peau. Essayez d’enlever le moins de chair possible, tout en éliminant les “yeux”.
- Étape 3 : Disposez maintenant les yeux restants en diagonale et retirez-les à l’aide de votre couteau, en creusant légèrement. Vous obtiendrez une jolie spirale, aussi belle que savoureuse.
- Étape 4 : Coupez ensuite le fruit en quartiers et ôtez le cœur fibreux (plus dur, moins sucré), si vous le souhaitez — quoique certains le mangent avec plaisir, question de goût. Et d’éducation gastronomique.
Pensez à garder les épluchures si vous êtes du type zéro déchet. Elles font merveille en infusion ou en sirop (on en reparle plus bas…).
Les mille et une façons de le savourer
L’ananas Victoria est si parfumé qu’il peut se déguster tel quel, à la petite cuillère, avec un filet de citron vert ou quelques feuilles de menthe fraîche pour réveiller les papilles. Mais si vous souhaitez explorer d’autres textures et accords, voici quelques idées gourmandes.
En carpaccio sucré
Tranchez finement l’ananas et dressez sur une grande assiette. Arrosez d’un filet de miel de letchis, parsemez de pistaches concassées et ajoutez un soupçon de fleur de sel. Le contraste sucré-croquant-salé est… comment dire ? Hypnotique.
Rôti ou grillé
Le sucre naturel de l’ananas caramélise divinement à la chaleur. Faites de belles tranches épaisses, poêlez-les avec une noisette de beurre, une pincée de cannelle et pourquoi pas un trait de rhum vieux. Servez avec une boule de glace coco, et vous voilà transporté en pleine plage réunionnaise à l’heure du coucher de soleil.
En version salée, oui madame
Oserez-vous l’ananas Victoria en salade composée ? Son acidité maîtrisée et son parfum intense se marient délicieusement avec une chiffonnade de jambon cru, quelques pousses d’épinards, des éclats de noix de cajou et une vinaigrette au gingembre. Un plat fraîcheur qui bouscule avec élégance les codes sucrés-salés.
Et les épluchures, on en fait quoi ?
Ce petit fruit ne veut décidément pas qu’on en perde une miette. Voici deux suggestions zéro gaspillage, pour tirer parti de ce qui d’ordinaire finit au compost.
Une infusion digestive maison
Dans une casserole, portez à frémissement les épluchures d’un ananas Victoria avec un litre d’eau, une rondelle de gingembre, quelques grains de poivre noir et une étoile de badiane. Laissez infuser à feu doux 20 minutes, filtrez, sucrez légèrement si nécessaire. C’est un excellent digestif naturel, parfait en fin de repas copieux.
Un sirop pour cocktails et pâtisseries
Faites réduire les épluchures avec du sucre (environ 200 g pour 500 ml d’eau) et un jus de citron. Laissez mijoter 30 minutes, filtrez, et conservez au frais. Ce sirop apportera une touche exotique à vos cocktails, à un simple verre de limonade, ou même à une pâte à crêpes… qui n’en demandait pas tant.
Petite leçon de terroir : pourquoi il est si bon ?
Ce qui rend l’ananas Victoria si exceptionnel, au-delà de son aspect miniature et de son goût sucré-acidulé, c’est surtout son terroir. Cultivé en altitude, sur des sols volcaniques riches et baignés de lumière, il pousse lentement — ce qui favorise la concentration des arômes. Les nuits fraîches et les journées ensoleillées de La Réunion donnent à ce fruit une qualité organoleptique unique.
Contrairement aux ananas géants d’Amérique centrale, récoltés à peine mûrs pour supporter les longs trajets, le Victoria est presque toujours cueilli à maturité. Résultat ? Une explosion de goût à chaque bouchée. Un fruit vivant, vrai, vibrant.
À ne pas faire : les erreurs courantes
Parce que même les meilleures intentions peuvent parfois mal tourner, voici ce qu’il vaut mieux éviter avec votre ananas Victoria :
- Le mettre au réfrigérateur tout de suite : il perdrait en parfum et en jutosité. Conservez-le à température ambiante, sauf s’il reste coupé.
- Le couper trop longtemps à l’avance : ses arômes s’oxydent au contact de l’air. Mangez-le dans l’heure pour profiter pleinement de ses saveurs.
- Le napper de sucre : inutile, franchement. Ce fruit n’a pas besoin d’artifices sucrés. Il se suffit à lui-même.
Finalement, un fruit qui invite à ralentir
Préparer un ananas Victoria, c’est un peu comme ouvrir un cadeau précieux. Ce fruit tropical aux origines insulaires nous propose quelque chose de rare : une invitation à prendre le temps. Le temps de le choisir, de l’observer, de le découper avec soin, et surtout… de le savourer les yeux fermés, en se laissant porter par ses effluves sucrés. Comme un rayon de soleil sur la langue.
Alors, ce week-end, pourquoi ne pas sortir des sentiers battus et faire d’un simple ananas, une star de vos assiettes ? Je vous le promets, il n’y a pas besoin d’aller loin pour voyager.