Le pastel de nata : un trésor croustillant venu de Lisbonne
Qui peut résister à cette petite merveille dorée que sont les pastéis de nata ? Ces délicieux flans portugais à la pâte feuilletée, croustillants à l’extérieur et fondants à l’intérieur, évoquent non seulement les ruelles de Lisbonne, mais aussi les parfums sucrés qui s’échappent des vieilles pâtisseries de Belém. Si vous avez déjà eu la chance d’y goûter, vous savez que ce n’est pas un dessert… c’est une émotion.
Mais la magie réside autant dans le goût que dans la préparation. Et devinez quoi ? Il n’est pas nécessaire de traverser la péninsule ibérique pour s’offrir ce voyage culinaire. Aujourd’hui, je vous livre la recette traditionnelle des pastéis de nata, ainsi que quelques astuces de pâtissier pour les réussir chez vous, comme à Lisbonne.
L’histoire croustillante des pasteis de nata
Pour bien comprendre un mets, il faut d’abord raconter sa petite histoire. Les pastéis de nata sont nés au 18ème siècle dans le quartier de Belém, à l’ouest de Lisbonne. Dans le silence des monastères, plus précisément celui des Hiéronymites, des moines les préparaient pour écouler les jaunes d’œufs inutilisés (les blancs servaient à amidonner les vêtements religieux).
Quand le monastère ferma, une pâtisserie fut fondée à ses portes — la désormais légendaire Pastéis de Belém — perpétuant ainsi ce savoir-faire sacré. Et depuis, chaque bouchée semble porter la mémoire de ces murs en pierre et de ces recettes gardées secrètes depuis des siècles…
Les secrets d’une pâte feuilletée légère et dorée
La base de tout bon pastel de nata, c’est sa pâte feuilletée. Bien dorée, délicatement croustillante et capable de supporter une garniture crémeuse sans flancher. Si vous êtes amateur de faits maison, la pâte feuilletée vaut le détour (et l’huile de coude !).
Mais soyons honnêtes : on peut également utiliser une pâte feuilletée pur beurre du commerce, et obtenir un résultat bluffant. Le secret réside surtout dans son roulage spécifique. Voici comment procéder :
- Étalez un grand rectangle de pâte, bien froid.
- Enroulez-la serrée en un boudin, puis emportez ce boudin au congélateur 15 minutes pour qu’il se raffermisse.
- Découpez ensuite des rondelles de 2 cm de large, et pressez les tranches dans vos moules à muffins pour former de jolies coupelles.
Ce pliage particulier crée ces spirales croustillantes typiques et donne une mâche aérienne en bouche… C’est là que commence la différenciation avec une simple tartelette.
La crème : onctuosité et douceur à la portugaise
Le cœur battant du pastel, c’est cette crème légèrement caramélisée, proche d’un flan mais plus onctueuse. Elle est confectionnée à partir de lait entier, jaunes d’œufs, un sirop de sucre parfumé au zeste de citron et à la cannelle, et parfois une pointe de vanille.
Le bon réflexe ? Précuire la base de la crème avec le lait et le sirop de sucre infusé, puis l’incorporer progressivement aux jaunes, hors du feu, pour éviter d’obtenir une brouillade sucrée (sacrilège !). Le mélange doit être soyeux, sans grumeaux, mais assez fluide pour vibrer légèrement à la cuisson.
Les proportions idéales :
- 250 g de sucre
- 125 ml d’eau
- 500 ml de lait entier
- 1 zeste de citron
- 1 bâton de cannelle
- 6 jaunes d’œufs
- 30 g de farine (ou de Maïzena)
Et l’astuce de grand-mère ? Laisser reposer la crème une heure avant de garnir les fonds : la magie de l’infusion opère lentement.
La cuisson : le moment décisif
Le pastel de nata se cuit très chaud. Dans les fours traditionnels portugais, la température grimpe parfois à 300°C. À la maison, on se rapproche au maximum : 250°C en chaleur statique ou en mode « pizza » si disponible.
La haute température permet :
- Une caramélisation de la surface du flan (ces petites taches brunes si caractéristiques).
- Un feuilletage vif, qui « claque » sous la dent.
- Une crème prise mais souple, sans fissure ni surcuisson.
La durée idéale ? Entre 10 et 15 minutes. Ne vous laissez pas piéger par leur petite taille : ils n’ont besoin que de peu de temps pour révéler tout leur potentiel.
Recette pas-à-pas : vos pasteis de nata comme à Lisbonne
Prêts à enfiler votre tablier ? Voici la recette complète, comme je la prépare à la maison lors de ces dimanches où l’envie de soleil portugais me titille.
Ingrédients (pour environ 12 pastéis) :
- 1 pâte feuilletée pur beurre (ou maison)
- 250 g de sucre blanc
- 125 ml d’eau
- 1 bâton de cannelle
- Zeste d’un citron non traité
- 500 ml de lait entier
- 30 g de farine
- 6 jaunes d’œufs
Préparation :
- Dans une casserole, portez à ébullition le sucre, l’eau, la cannelle et le zeste. Laissez frémir 2 minutes. Réservez le sirop.
- Dans une autre casserole, délayez la farine avec un peu de lait, puis ajoutez le reste du lait en remuant. Faites chauffer à feu doux jusqu’à épaississement.
- Versez le sirop chaud dans le lait épaissi (après avoir retiré la cannelle et le zeste). Remuez bien.
- Laissez tiédir 5 minutes avant d’ajouter les jaunes en fouettant vivement.
- Découpez des rondelles dans votre pâte feuilletée roulée, chemisez les moules, puis remplissez aux 2/3 avec la crème.
- Enfournez à 250°C pendant 12-15 minutes. Les pastéis doivent être bruns sur le dessus, mais tremblotants au centre.
- Démoulez tièdes et servez avec un soupçon de cannelle ou de sucre glace… ou les deux.
À déguster comment ? À n’importe quelle heure !
Le matin au petit-déjeuner, avec un bon bica (café portugais bien serré), à 16 heures avec un thé noir puissant, ou même en dessert après une dorade grillée… Les pastéis de nata se moquent des conventions horaires.
Leur flexibilité les rend adorables : ils passent de la table familiale aux cocktails dînatoires avec charme (je vous vois déjà les servir en version mini sur un plateau apéritif chic à la catégorie Canape Food de ce blog… malin, non ?).
Variantes à oser (ou pas… les puristes nous surveillent)
Vous avez essayé la version classique ? Alors peut-être aurez-vous envie d’explorer… tout doucement :
- Version à la vanille intense : on remplace la cannelle par une demie-gousse de vanille grattée.
- Pastéis au chocolat : un carré de chocolat noir au centre de la crème avant cuisson.
- Pastéis vegan : avec du lait végétal et de la fécule, mais on vous prévient : c’est un autre univers.
Mais parfois, comme pour un fado murmuré dans les rues d’Alfama, il faut savoir garder les choses simples et intimes. La version traditionnelle reste pour moi la plus émouvante.
Un flan, une histoire, une tradition à partager
En parlant des pastéis de nata, j’entends encore ma vieille voisine portugaise me dire, entre deux éclats de rire : « Ils sont meilleurs le jour même, encore chauds, quand la pâte craque et que la crème danse… » Et c’est vrai. Il y a dans ces bouchées un appel à la lenteur, à la gourmandise sans culpabilité.
En cuisinant, vous ne préparez pas seulement un dessert. Vous perpétuez un savoir-faire, vous offrez un bout de patrimoine, vous amenez à votre table les effluves des ruelles pavées de Lisbonne.
Et si vous en avez un peu trop (est-ce seulement possible ?), sachez qu’ils se réchauffent parfaitement 5 minutes à 180°C. Mais entre nous, il y a peu de chance qu’ils passent la nuit…